Une forme dépourvue de descriptions

Pas de description dans la forme poétique du haÏku. Seule s’exprime l’émotion passagère d’un instant. L’âme, en se dénudant, fixe les choses avant qu’elles ne s’éteignent d’elles-mêmes dans le cours du temps et de la vie. Ne nous y trompons pas. Il s’agit là, derrière la forme très codifiée des trois vers selon le rythme 5/7/5, de n’exprimer qu’une sensation. Les mots dans leur pureté, la figent dans un instantané originel. C’est au lecteur sans doute d’imaginer ce qui n’est pas montré ou décrit.

Un oiseau noir en littérature
Un oiseau noir en littérature

L’expression d’une disponibilité au monde

Pas de pensée non plus. Il ne s’agit pas d’aphorisme mais l’expression d’un moment qui émerveille. Célébration de l’évanescence de l’instant et donc de toute vie, le Haïku trouve son intensité dans la tension entre la ligne écrite et lue et le reste du poème. Cette tension, presque miraculeuse, impose une disponibilité au monde. L’effet en est cathartique et la libération qui suit offre la fermeté d’un courage face à ce qui advient.

Même le bruit de la cascade

S’est affaibli

Le chant des cigales.

CHIYO-NI

Un oiseau noir en littérature

L’instant étiré jusqu’à l’éternité.

On pourrait tout aussi bien parler d’éclair rendu à son éternité et lire un poème de cette sorte impose souvent de le relire pour goûter la quintessence d’un sentiment passager et subtil. Ainsi le poète dit son attachement au vivant par la simplicité du mot choisi.

Un oiseau noir en littérature

L’insignifiance des choses fragiles atteste des manifestations « émanatoires « des sensations.  La grâce est imprévisible, l’’instant de sensibilité est épuré de tout artifice grammatical ou syntaxique. L’artiste ne s’émeut pas, il suggère le moment qui s’étire et se fige …. pour notre plus grand bonheur !

Un oiseau noir en littérature
Un oiseau noir en littérature

Des poètes français , à leur tour se sont essayés à cette forme brève. Eluard sous le texte collectif Pour vivre ici ( 1920) et Claudel dans Cent phrases pour éventails ( 1942 ), en particulier sont de ceux-ci. Me vient aussi le nom de François Cheng qui, lui, choisit, la forme du quatrain, rendant ainsi hommage à la langue française dans son magnifique recueil Enfin le royaume.